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ITW Pascal Legendre (2e partie) : « La Pro A progresse d’année en année mais moins vite que les autres »

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Du début de l’aventure de Maxi-Basket en 1982, Pascal Legendre est l’une des plumes les plus renommées du basket français. Depuis un demi-siècle, il suit l’actualité de la balle orange. Après la première partie, publiée hier, voici la deuxième où il nous donne sa vision du basket français d’aujourd’hui.

Vous avez été témoin de la professionnalisation du basket. Comment jugez-vous les récentes évolutions de la LNB ?

Pascal Legendre dans sa salle préférée, Beaublanc (photo : Hervé Bellenger)

Pascal Legendre dans sa salle préférée, Beaublanc (photo : Hervé Bellenger)

Après avoir été réticent j’avais été plutôt favorable à la finale du championnat de France sur un match à Paris, car on m’avait convaincu que c’était le seul moyen d’attirer France Télévisions. Seulement, après deux éditions et des audiences faibles, dues en partie à l’absence de promotion, le service public a de nouveau décrété l’écran noir pour le basket. Le principe ne se justifiait plus. Dans ce contexte, le retour de la finale en cinq manches, qui avait été expérimentée dans les années 90, est une excellente décision car cela élimine le côté loterie que possède la finale sèche. C’est le principe des vraies playoffs inventé par les Américains et repris quasiment partout dans le monde. Il doit bien y avoir une raison ! Jean-Luc Monschau s’est plaint plusieurs fois que le public de Nancy a été privé d’un paquet de matchs à Gentilly, le Sluc ayant participé à cinq finales à Bercy, on ne peut pas lui donner tort. C’est quand même frustrant d’encourager son équipe toute la saison jusqu’en demi-finale des playoffs et de ne pas pouvoir le faire lors du final. Ceci dit, trois matches supplémentaires dans un bref délai, ça ponctionne le portefeuille de chacun surtout en période de crise. Or le véritable succès de cette formule se mesurera à la capacité des finalistes à remplir leur salle à ras bord. D’une façon plus générale, le président de la Ligue, René Le Goff, avait amorcé un virage très intéressant avec son « Livre Blanc » qui devait amener la création de franchises plus ou moins déguisées avec l’obligation d’avoir une salle d’une capacité minimale, une structure administrative solide, etc. Je plaide pour les franchises depuis 25 ans, y compris dans le foot. Cela éviterait que l’on construise des stades de 25 000 places à fond perdu comme cela a été fait au Mans, avec un club aux abois financièrement, menacé de rétrogradation sportive en Nationale et administrative en CFA. Ce qui est déjà arrivé pour Grenoble. Que faudra t-il faire si le BCM, je ne leur souhaite pas, était menacé de Pro B une fois installé dans son palais des sports de 10 000 places à Dunkerque ? Bref, le projet de René Le Goff a été stoppé net par la « Loi Lamour ». Vraiment dommage.

« Incontestablement Alain Béral a impulsé une nouvelle dynamique »

photo : Benjamim Bonneau

Ensuite la LNB a longtemps fait du surplace, surtout quand René Le Goff est tombé gravement malade. Pourtant sa structure nationale, dans le bâtiment de la fédération à Paris, avait déjà pris du volume. Je voudrais rappeler qu’à partir de sa création en 1987 et pendant de nombreuses années, elle ne fut composée que de son directeur administratif Thierry Foucault et d’une poignée de secrétaires, bien trop peu pour gérer les enjeux cruciaux de l’époque. C’est à ce moment que le train de l’Histoire est passé devant le basket à toute vitesse. Incontestablement Alain Béral a impulsé une nouvelle dynamique. Comme l’a fait remarquer Jordi Bertomeu, le directeur de l’Euroleague, le partenariat avec Disneyland Paris est la meilleure nouvelle venue de France depuis dix ans. La première édition de la Leaders Cup a été pour moi une réussite. C’était une première et tout est parti d’une feuille blanche. Attention, je ne dis pas que tout est déjà parfait. Parce que c’est ma partie, j’aurais bien aimé qu’il y ait davantage de représentants de la presse, une couverture médiatique supérieure. Mais tout ce que l’on peut souhaiter c’est que le partenariat soit prolongé. Pour les wild cards, je suis pour, si c’est pour favoriser l’éclosion d’un grand club dans une grande ville, à Marseille, Lille ou Bordeaux. Mais si c’est pour sauver un club déjà en place mis en péril par ses résultats sportifs, non. Ou alors OK, mais cela s’appelle des franchises, on y revient, et cela doit être décidé en amont, pas en repêchage.

Quels changements aimeriez-vous voir dans le basket français (les Espoirs en NM2, une Ligue Atlantique etc.) ? Pensez-vous que le basket français va dans la bonne direction ?

Dimitris Giannakopoulos

Il est difficile de porter un jugement définitif sur ce projet de Ligue Atlantique puisque je ne sais pas quels clubs de quels pays seraient concernés. Y aurait-il l’Allemagne ou juste la Belgique, les Pays-Bas, l’Angleterre et le Portugal ? S’agit-il de remplacer la FIBA Cup dont tout le monde se fiche ou davantage ? La place de la France en Euroleague vient d’être confirmée par Jordi Bertomeu, aussi je crois comprendre que le champion de France y participera la saison prochaine… Tant mieux, même si… Cette compétition est biaisée. Pourquoi ? Dans le basket de haut niveau tout est question d’argent. Avant l’arrêt Bosman, vous aviez deux étrangers par équipe, souvent Américains, et huit autochtones. Aussi vous deviez former de bons joueurs locaux pour être compétitifs, et mettre le paquet financier sur deux étrangers. C’est ainsi que le Real Madrid, les clubs italiens, mais aussi yougoslaves sans étrangers se sont taillés la part du lion. Aujourd’hui, l’interpénétration est totale et vous pouvez bâtir une équipe cosmopolite en un ou deux ans. Qu’est-ce qui empêcherait, si ça l’amuse, un émir du pétrole, un magnat russe ou un milliardaire texan de mettre 30 millions d’euros sur le champion de République tchèque, de Finlande ou même d’Andorre et d’en faire au minimum un participant au Final Four ? Contrairement à une société classique la quasi-totalité des clubs d’Euroleague ne vivent pas de leurs recettes propres, des droits TV, du marketing, des recettes guichets, mais grâce à un, disons, pour employer un mot passe-partout et édulcoré, mécène. Que seraient le Panathinaikos sans les frères Giannakopoulos, le Barça et le Real sans le soutien de la section football ? Or j’ai lu que la dette de ces deux clubs représente un tiers des quatre milliards de dettes de la ligue de foot espagnole ! C’est proprement scandaleux quand on sait que l’Espagne est enfoncée dans une crise économique terrible. Du pain et des jeux, rien n’a changé depuis les Romains, mais cela dérégule complètement le marché des joueurs. Après un petit vent de folie il y a 20-25 ans, les clubs de Pro A sont sains financièrement, contrôlés, et ne peuvent pas lutter économiquement, donc sportivement, avec les châteaux de sable espagnols ou autres. En bossant encore mieux, avec une plus grande stabilité au sommet de notre basket, une grande salle, un club français pourrait passer de 5 à 7 ou 8, peut-être 10 millions de budget. Et alors ? Il parviendrait sans doute assez régulièrement au top 16. Et ensuite ? Il s’y ferait laminer comme actuellement les deux clubs allemands. Alba Berlin en est à ce jour à 1 victoire en 10 matches. Berlin ! Le club de la capitale du pays le plus riche d’Europe. Berlin, qui possède une salle fantastique, l’O2 World. Il y avait ainsi 12 000 spectateurs pour le match d’ouverture du top 16 contre le Real. Je suis certain que ses dirigeants optimisent leurs possibilités mais aussi qu’il n’y a pas de financement occulte pour booster le budget.

« Si le basket est dans la hype, il faudra s’y montrer. Monsieur en costard, madame en talons aiguilles »

Il faut au moins 20 millions d’euros pour avoir le Final Four dans le viseur et en plus ces clubs-là, de la Méditerranée, russes, ne payent pas ou très peu de charges sociales. Alors, moi j’en ai marre de voir notre Bleusaille monter joyeusement au front en octobre et se faire systématiquement mitrailler. Ce que je souhaite concrètement ? Sans parler du foot, les Qataris ont investi 10 millions d’euros dans le PSG hand s’achetant quelques uns des meilleurs joueurs du monde. 10 dans le hand, alors pourquoi pas 20 ou 30 dans le basket ? Avec ça, vous pouvez viser le sommet européen. Avec ça et un Bercy rénové ou un autre palais des sports de 15-20 000 places qui sortirait de terre, vous pourriez faire du basket un must à Paris. Je connais un peu la mentalité parisienne. Pas question d’aller se fourvoyer à Coubertin ou à Marcel-Cerdan à Levallois, mais si le basket est dans la hype, il faudra s’y montrer. Monsieur en costard, madame en talons aiguilles. Comme au Staples Center à Los Angeles ou au Madison Square Garden à New York. Je connais un couple qui n’a qu’une envie depuis quelques semaines : aller au Parc pour voir, pas le PSG, mais David Beckham, pas le joueur, l’icône médiatique, la marque ! Croyez-vous d’ailleurs qu’un club NBA remplit chaque saison 41 fois sa salle de 20 000 places uniquement avec des fans de basket ? Évidemment non. Et si un club parisien de basket était tout en haut de l’affiche, croyez-moi que l’on détacherait très vite l’étiquette de loser au basket français. Cela aurait un effet très positif sur sa ligue, ses clubs. On verra rapidement si je rêve ou pas. Il y a 20 ans, lorsque Limoges était champion d’Europe, on se plaignait à juste titre que l’équipe de France n’était pas compétitive et donc pas rassembleuse. Aujourd’hui, c’est tout le contraire. L’équipe de France est la 2e équipe nationale européenne, sur le papier la 3e au Monde, elle possède des superstars médiatiques, mais comme elle est composée très essentiellement de joueurs NBA, elle ne sert pas à proprement parler la promotion des clubs français. Sinon, outre le contrat pluriannuel avec Sport +, le basket a absolument besoin d’une ouverture sur une chaîne en clair. Je ne suis pas utopique, l’époque, il y a 25 ans, où un match de championnat sur Antenne 2 rameutait jusqu’à 3 millions de téléspectateurs est révolue. Mais on a bien vu à l’occasion des Jeux Olympiques et de l’épopée des Bleues de Céline Dumerc qu’une chaine hertzienne a toujours le pouvoir de faire passer un sport de l’ombre à la lumière. Des décrochages régionaux sur France 3 me paraissaient être le canal idéal car le basket est costaud dans ses bastions et un Chalon-Dijon, un Cholet-Le Mans ou un Nancy-Strasbourg pourraient avoir un fort retentissement local. Il y a un an, cela paraissait en très bonne voie mais une source interne m’a indiqué récemment que les directeurs des stations locales de France 3 n’ont pas voulu financer la production. J’espère que d’autres voies seront explorées. Sur la TNT ? Sur Internet ? Peu importe, la LNB a besoin d’être exposée à tous. La possibilité de regarder sur le site de la LNB le magazine « Lundi Basket », originellement réservée aux abonnés de Sport +, est un petit pas dans la bonne direction.

Concernant le niveau actuel de la Pro A et la Pro B, comment le trouvez-vous ? 

Don Collins et Michael Brooks

On ne va pas se mentir. Le véritable baromètre de la valeur de nos équipes de clubs, ce sont les compétitions européennes. Or, nous ne sommes plus compétitifs en Euroleague et nous n’avons pas un qualifié au Last 16 de l’EuroCup. Je ne veux pas faire mon vieux schnock, mais ni Ricardo Greer, ni Blake Schilb n’ont le pedigree de Don Collins, Michael Brooks, Delaney Rudd, et je ne parle pas de Billy Knight ou Kelly Tripucka. Après en valeur réelle, le championnat de France progresse d’année en année mais… moins vite que les autres. Ce qui est frappant, c’est la petite taille des intérieurs car chaque centimètre supplémentaire vaut une fortune. Et comme je l’ai écris sur mon blog, en plus de la valeur de son coach et d’un bon casting d’Américains, les bons résultats de Strasbourg sont dus à la présence de deux big men, Alexis Ajinça et Romain Duport, qui dénotent dans le paysage. Ceci dit, J’ADORE voir un match de Pro A. À l’inverse, j’ai l’impression que le niveau de la Pro B est en augmentation mais étant donné le peu de matchs que je vois dans une saison, je me garderai d’un jugement définitif.

Êtes-vous, comme beaucoup, pour passer à moins de non-JFL encore dans les effectifs de LNB ? Ou, au contraire, vous prônez une certaine stabilité (cinq non-JFL) ou des changements comme la suppression des « JFL » pour revenir au système précédant afin de favoriser le « mixage » des baskets (extracommunautaires, Bosman, Cotonou et bien sur Français) ?

La question des nationalités est la plus complexe à laquelle est exposée le basket européen depuis… toujours. Il faut se souvenir que la Lituanie a été championne d’Europe avant la 2e guerre mondiale guerre grâce à la présence d’un Américain, Frank Lubin, né à Los Angeles, et qu’elle a déclaré comme étant Pranas Lubinas, né au pays. Est-ce par exemple satisfaisant de voir Alain Koffi privé de l’équipe de France lorsque Joakim Noah y est sous prétexte qu’on n’a le droit d’aligner qu’un « naturalisé » par équipe ? Alain a un peu tardé à obtenir ses papiers alors qu’il est arrivé dans la région parisienne tout jeune. Joakim est quand même le fils du Français préféré des Français. Seulement, si la FIBA avait laissé faire, il y aurait eu 3, 5 et pourquoi pas 10 Bo McCalebb dans l’équipe de Macédoine. C’est pareil au niveau de la Pro A. Je ne peux pas entendre le discours comme quoi le championnat de France est sectaire, cadenassé par les joueurs français, alors que l’on peut présenter un cinq de départ 100% étranger. Seul le basket s’autorise à ce que sa langue de communication ne soit pas en Pro A le français mais l’anglais. Que dirait-on si on entendait les entraineurs de hand parler allemand aux temps-morts ? Il y a pour moi deux aspects.

« Je trouve très dommageable que les coachs soient devenus les personnages les plus connus des clubs »

A.J. Slaughter et Derrick Obasohan, deux des nombreux Etats-Uniens passés à Cholet ces dernières années (photo : Loïc Favard)

Il est normal, je dirais sur un plan de l’étique, que les meilleurs jeunes issus des centres de formation, financés par les collectivités, aient une possibilité réelle de jouer avec les pros. Et deuxièmement, sur un plan de « produit basket », il n’est pas bon du tout d’aligner un maximum de joueurs étrangers non identifiables car non référencés et complètement interchangeables. Tout le monde a besoin de reconnaître les joueurs, de se reconnaître dans une équipe, un championnat. Je connais presque tous les noms des Américains des années 60, 70, 80 car il n’y en avait que deux par équipe avec une grande stabilité. Ne me demandez pas la liste des Américains actuels du Havre ou de Nanterre, je vais être recalé à l’examen ! Je connais la réplique : « les gens s’identifient aux équipes qui gagnent et deuxièmement, il y a trop peu de JFL sur le marché et donc leurs salaires sont trop élevés. » Premièrement, quand je parle de « produit basket », c’est au niveau national et je trouve très dommageable que les coachs soient devenus les personnages les plus connus des clubs. C’est bien la preuve d’une perte d’identité des joueurs. Ce sont les joueurs et uniquement les joueurs qui peuvent être les stars qui satisferont un public. Deuxièmement, s’il n’y a pas assez de JFL, il faut en former davantage ou alors réduire le nombre de clubs. J’ai écris un jour que j’étais pour une ligue quasi fermée de 12 clubs jouant deux matchs aller-retour. Je sais que je n’ai aucune chance d’être entendu !

Pour finir, après toutes ces années à suivre le basket, êtes-vous toujours aussi passionné ?

Il y a deux domaines où je n’engagerai pas le débat, où je camperai sur mes positions. La meilleure musique de tous les temps a été produite par le groupe anglais Pink Floyd dans les années 70. Deuxièmement, à jouer, à regarder, à commenter, le basket-ball n’a pas d’équivalent. David Gilmour est le Léonard de Vinci de la guitare et Michael Jordan celui du jeu de basket-ball…


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